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Gregory Forstner, le jeune Enzo du Grand Bleu [interview exclusive]


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Gregory Forstner… ce nom résonne sans doute  moins que celui de Jean-Marc Barr ou de Jean Reno. Pourtant Gregory est resté dans la mémoire collective de tous les passionnés d’apnée et de cinéma. Il y a trente et un an,  Gregory tournait à Amorgos en Grèce des scènes pour le Grand Bleu de Luc Besson. Celui qui n’avait alors que onze ans incarnait le fameux Enzo Molinari jeune. Au début du film, on se souvient tous de cette scène où Enzo défie Jacques pour aller chercher la pièce au fond de l’eau. C’est à ce moment là qu’il déclame sa célèbre réplique « Roberto Mio palmo »!

Pour France Apnée, Nicolas Proquin s’est  longuement entretenu avec Gregory Forstner pour évoquer notamment ses souvenirs du tournage du film de Besson en 1986. Notre reporter a également abordé avec Gregory  « l’après » Grand Bleu sorti en 1988. Enfin, à travers cet entretien nous verrons que Gregory ne s’est pas coupé du monde de l’apnée et que sa relation à l’eau est restée forte depuis toutes ces années.

***

Gregory, vous avez joué le rôle d’Enzo (jeune) quand vous aviez 11 ans. Est-ce que 30 ans après ce rôle vous colle encore à la peau ?

Le rôle ne me colle pas à la peau, mais naturellement j’ai développé une affection particulière pour « Enzo enfant » du film… Il est attachant, il est facile de s’identifier à lui, son côté bousculant et gourmand n’est qu’une parade couvrant sa sensibilité et son amitié pour le « petit Jacques ».

Gregory Forstner par Patrick Camboulive (1986)

Quels souvenirs gardez-vous du tournage ?

Difficile de résumer en quelques lignes. J’avais conscience que je vivais une expérience hors du commun, et en même temps je n’y pensais pas. Je vivais l’instant présent. Je me souviens absolument de tout. Luc était très accessible, presque enfantin. Lui aussi jubilait d’être là, c’était son rêve de faire ce film. De façon très naturelle, pour le temps du tournage, je me suis identifié à mon rôle d’Enzo. Lorsqu’il y avait trop de vent, je louais une petite moto, un Dax avec lequel je parcourrais l’île, seul, sans casque et en short. J’évoque ces souvenirs dans un livre publié il y a 2 ans « L’odeur de la viande – portrait de l’artiste en jeune homme» (éditions Esperluète). J’étais dans la découverte d’un paysage qui me semblait vierge, sensible, immense et sans fin. Chaque virage était à couper le souffle. Je me souviens ressentir une liberté inouïe, une jouissance et une puissance nouvelle.

Gregory Forstner et les acteurs du Grand Bleu par Patrick Camboulive (1986)

Jean Reno était très cool avec moi, on jouait au ping pong, il criait « oh le con » quand je faisais un smatch, tout cela était tout à fait normal. C’est ça qui était formidable. Je me souviens très bien de Jean Bouise, de sa gentillesse et de sa bienveillance, de la présence fraternelle de Marc Duret. Jean-Marc Barr semblait dans son rôle pendant et en dehors du tournage, très discret. J’étais très jeune et lui vivait l’une des plus grandes expériences de sa carrière. Il était très concentré.

Est-ce que le succès planétaire du film a changé la vie du jeune adolescent que vous étiez à l’époque ?

J’avais eu quelques articles dans les journaux et naturellement les enfants à cet âge peuvent être jaloux. Donc, je n’en parlais jamais, sauf à mes amis proches. Mais de façon général, j’étais plus gêné, j’avais presque honte. Je voulais exister par moi-même, et non pour un rôle dans un film. Lorsque je suis rentré à l’école après le tournage et après avoir loupé la rentrée de 3 semaines en septembre, mes cheveux était comme dans le film, courts, noirs, j’étais toujours Enzo ! Impossible de passer inaperçu… L’effet qu’a une telle visibilité est que vous avez l’impression d’avoir été vampirisé. C’est une sensation étrange d’être dépossédé d’une forme d’intimité. Pour moi, l’expérience du film était une expérience privée, et sans prévenir c’était devenu du domaine public.

Avant le tournage du Grand Bleu, connaissiez-vous le milieu de l’apnée ? Comment avez-vous été retenu pour incarner Enzo Molinari  ?

On ne parlait pas de « monde de l’apnée » à l’époque, il n’y avait pas de réelle communauté à ma connaissance, c’est le film qui a apporté une visibilité comme jamais avant. Il y avait des initiés, la chasse sous marine bien sûr était pratiquée partout. Mais « le monde de l’apnée » tel qu’on l’entend aujourd’hui, avec la compétition qui va avec, a été popularisé grâce au film et par le biais du livre « Homo Delphinus » de Mayol qui évoque les performances successives d’Enzo et lui-même.

Mon père était plongeur professionnel, chef de barge offshore, il m’a initié à la plongée très tôt, si bien que bien avant le film la mer faisait déjà parti de ma vie et puis j’avais déjà fait de la compétition en natation. J’étais habité par les histoires de pêches et de rencontres sous l’eau racontées par mon père au retour de ses voyages. Dans mon imaginaire, c’était un monde rempli de mythes et de créatures fantastiques. Je me souviens plonger en Corse, d’un rocher sous l’eau qui montait d’une profondeur de 25 mètres, presque jusqu’à la surface – on se jetait comme si l’on était en chute libre, planant jusqu’à atteindre le fond. Tout autour se déroulait un paysage au ralenti, un bien être qui ne m’a jamais quitté. J’avais 9 ans, c’était 2 ans avant le film…

(2eme partie de la question) :

Ma mère avait vu une annonce dans un magazine, une production cherchait un adulte pour jouer l’un des rôles de plongeurs dans le film. Elle a envoyé (sans même nous en parler) une photo de mon père et moi, bouteilles sur le dos, sortant de l’eau à Antibes. Quelques mois plus tard, on reçoit un appel de la production pour une invitation à un casting à Paris. Pendant le casting, Luc me demande de marcher de droite à gauche, de regarder la caméra « dans les yeux », il me pose quelques questions, il veut savoir si j’ai des amis, si j’aime l’école… Je me souviens ne pas avoir été très loquace… Je n’ai fait aucun effort, mais je suis resté poli… Quelques semaines plus tard, on nous appelle pour nous dire que je suis pris pour le rôle.

Avez-vous gardé contact avec certains acteurs du film ?

J’ai été en contact avec Luc Besson jusqu’à mes 15 ans, lorsque j’ai passé une année dans une famille d’accueil à Key West, en Floride. Nous avions échangé une ou deux lettres, il avait prévu de faire des prises de vue pour son film « Atlantis » au large des Keys. Je crois que les scènes ont été tournées ailleurs, et je ne l’ai jamais revu. Très récemment, les circonstances ont fait que j’ai retrouvé Jean-Marc Barr et Marc Duret.

Gregory Forstner (Enzo), Bruce Guerre-Berthelot (Jacques) et Luc Besson (photo: Patrick Camboulive – 1986)

Est-ce que vous avez poursuivi dans le cinéma après le film de Besson ?

J’ai fait quelques pubs à l’adolescence, dont une pour une chaine Italienne dont le générique se passait sous l’eau… J’étais nageur et faisais un peu de chasse sous marine (j’étais en « sport études » monopalme à Antibes) donc j’ai été sélectionné. Le tournage s’est fait dans une piscine à la Victorine à Nice. Mon rôle était de passer devant la caméra les yeux ouverts, sans masques et de sourire, faire le pitre… Suite à ça j’ai été aveugle toute la journée durant dû au chlore, c’était horrible. Je leur en veux toujours !

J’ai fait quelques autres tentatives, mais je n’étais pas très motivé car il fallait obéir à des règles que je trouvais absurdes. J’étais heureux simplement, sans ambitions particulières, je faisais beaucoup de sport (natation, athlétisme, etc) et je passais beaucoup de temps seul à dessiner. Le métier d’acteur me paraissait vain. Je n’étais pas assez mûr pour voir plus loin. Et puis j’étais trop préoccupé par la volonté d’exister par moi-même, j’ai été avalé par l’art.

Que faites-vous aujourd’hui ?

Je suis artiste. J’ai fait les beaux arts de Nice (La Villa Arson), j’ai étudié également en Autriche, à Paris et je vis à New York depuis 10 ans après avoir été lauréat pour une année de résidence et une bourse du ministère de la culture. Mon travail est représenté dans plusieurs musées en France et à l’étranger, des fondations et dans des galeries. La principale galerie étant en Allemagne, la galerie Zink. Une Monographie couvrant plus de quinze années de mon travail vient d’être publiée aux éditions Dilecta (Paris).

Gregory Forstner dans son atelier new-yorkais

Jacques Mayol a été associé au tournage du Grand Bleu. L’aviez-vous rencontré ? Quel souvenir gardez-vous de cet homme ?

Luc besson lui doit beaucoup dans le réalisme des scènes en apnée. Mayol l’a aidé en prêtant son nom, mais également dans son approche de la mer d’un point de vue psychologique et philosophique. Dans « Dolphin Man », on y découvre, entre autres, des films d’époque montrant les apnées de Mayol ainsi que sa préparation… J’ai été frappé de voir que certains cadrage ont été repris à l’identique par Luc Besson tout en y ajoutant le magnétisme et la dramaturgie du cinéma.

J’ai rencontré Jacques Mayol deux fois. J’étais naturellement ému car sa réputation le devançait, mais je le sentais fuyant, peut-être n’était-il pas à sa place. Je ne savais rien de ce qu’il vivait, je pense qu’il avait une relation de fascination contradictoire avec le film. À la fois fier et heureux de montrer au plus grand nombre qui il était – il devenait une « star » – et de partager son monde. Mais en même temps peut-être qu’une partie de son intimité s’épuisait aussi. C’est compliqué. Ce qui est troublant et passionnant chez lui et c’est ce que j’aurais souhaité d’avantage découvrir dans le film « Dolphin Man », c’est l’ambivalence de son tempérament. C’était un homme en harmonie avec la nature, un visionnaire, un précurseur concerné par l’environnement. Il avait le sourire d’un enfant capable de s’abandonner totalement, désintéressé. Mais Jacques était aussi très terrien dans un sens narcissique, conscient de son magnétisme, charmeur, très bon orateur, pédagogue, en demande de public et de reconnaissance.

Gregory et Jacques Mayol (archives personnelles / famille Forstner)

Il y a un an disparaissait le vrai Enzo… Avez-vous déjà eu l’occasion de le rencontrer ?  Pensez-vous que « le » Enzo de Besson soit proche de la réalité ?

Malheureusement non, je ne l’ai jamais rencontré. Avec Christian Maldamé [ndlr : apnéiste français de haut niveau], on se disait que le côté dragueur et bon vivant d’Enzo dans le film ressemble beaucoup plus à Mayol. Et la discrétion de Mayol dans le film d’avantage à celle d’Enzo Mairoca !

L’apnée était une chose très sérieuse pour lui, il se préparait comme un grand athlète, la seule chose qui ressemble un peu au Enzo du film, c’est qu’il avait une stature, un physique et une présence importante. Le rôle d’Enzo dans le film ressemble en vérité davantage à Pipin… Maiorca fut choqué par son rôle à l’écran et a réussi à interdire le film en Italie. Il a dû le vivre comme une trahison, notamment vis-à-vis de Jacques Mayol qui aurait pu (dans l’esprit de Maiorca) a tout moment rectifier ou influencer – ne serait-ce que prévenir son ami que le portrait qui était fait de lui portait atteinte à son intégrité. Maiorca ne pouvait comprendre et anticiper le rôle du cinéma, du spectacle, il était loin de tout ça. Plonger ne pouvait être l’objet d’un sketch, d’une bande dessinée, d’une caricature. Hors l’ironie est que pour le public, si le Mayol du film est le « héros » puriste du Grand Bleu, toute la sympathie revient à la performance de Jean Réno qui campe un Enzo attachant et plein de couleur. Le binôme du « petit français » et du « grand Enzo » est une réussite.

Gregory, êtes-vous retourné sur les lieux du tournage du Grand Bleu à Amorgos en Grèce ?

En Septembre dernier, oui, pour la première fois depuis 30 ans… invité par Vivi Draka pour « The Authentic Big Blue » [ndlr : un compétition d’apnée en profondeur]. Ce fut incroyable, un véritable retour sur les lieux de l’innocence. Tous les matins, j’étais sur le bateau avec les athlètes pour assister au déroulement de la compétition. Quand on connaît les circonstances de la compétition, c’est une place rare qui me fut offerte car normalement il n’y a pas de public. J’ai vécu des moments inoubliables et les rencontres que j’ai faites, les athlètes, photographes, les organisateurs, les gens du village et de l’île m’ont sincèrement émues. Retrouver Jean-Marc Barr 30 ans après sur le même site fut comme une première rencontre, mais avec la familiarité d’une expérience partagée.

Gregory Forstner et Jean-Marc Barr (photo : Petros Chytiris)

J’ai retrouvé à Amorgos les routes que j’avais emprunté à fond sur mon Dax à l’âge de 11 ans. J’ai nagé dans les mêmes eaux bleues en face du monastère… Le lieu de la compétition était situé à l’endroit exact ou j’étais il y a 30 ans, juste en face du rocher ou je suis assis en train de pécher et ou je crie « Jacques » lorsque je comprends que son père est en train de se noyer. Quelle émotion !

Après avoir assisté à cette compétition, que pensez-vous de l’apnée moderne ?

Adolescent j’étais abonné au magazine Apnéa, j’avais suivi un peu les aventures de Pipin et Pelizzari, donc j’étais un peu familier quand même. Mais le vivre en live, c’est autre chose ! J’ai trouvé cela très impressionnant. Ce qui m’a surtout frappé, c’est l’humilité des athlètes. Comme il est très difficile de gagner sa vie comme apnéiste, la plupart ont un métier, ont étudié une autre discipline, leur rapport et leur passion pour la plongée n’en est que renforcée car c’est le lieu du fantasme et du désir d’accomplissement personnel, un échappatoire aussi pour certain. Pour faire ce « sport » (c’est bien plus qu’un sport), il faut une disponibilité à la naïveté, à l’innocence. C’est ce qui transparait chez la plupart des athlètes que j’ai rencontrés et qui m’a le plus touché, et en cela je me reconnais. Il est très difficile dans nos sociétés compétitives, de profit et de calcul, de valoriser ou tout simplement de trouver un terrain pour l’expression de cette innocence…

L' "authentic Big Blue", la compétition d'apnée à Amorgos ( photo : Petros Chytiris)

L’ « authentic Big Blue », la compétition d’apnée à Amorgos ( photo : Petros Chytiris)

Pratiquez-vous la plongée en apnée ? Qu’est-ce que vous aimez dans ce sport ? 

J’en faisais adolescent. Enfant, j’ai failli me noyer 3 fois, 2 fois à moins de deux ans au Cameroun où je suis né (c’est ma mère qui m’a sauvé à chaque fois), et une fois à l’âge de 11 ans dans le Pacifique – cette fois-là, je m’en suis sorti seul (dans « L’Odeur de la viande », j’ai écrit un texte à ce sujet qui s’intitule « l’Effet d’une rencontre »…). Lorsque l’on vit une telle expérience, il se peut qu’il y ait quelque chose qui nous pousse à y retourner, à comprendre cette sensation contradictoire de perte et de bien être, d’abandon.

Lorsque je nage, il arrive un moment particulier ou je ne sais si c’est l’eau ou l’air que je respire. C’est une sensation de liberté et de plénitude incroyable. Je ne pense plus à rien, je n’ai d’autre ambition que de mettre un bras devant l’autre, sans aucun but sinon « d’avancer ».

Gregory nageant au large d'Amorgos (photo : The Authentic Big Blue - 2017)

Gregory nageant au large d’Amorgos (photo : The Authentic Big Blue – 2017)

Après la sortie du film, j’ai été très surpris de voir des clubs d’apnée se former, et je ne savais quoi en penser, je ne pouvais me projeter dans un club, c’est idiot. Ma relation à la mer est liée à la relation avec mon père, et naturellement à ma mère, c’est très intime. Je ne pouvais concevoir de partager cela avec des « inconnus » et faire de l’apnée comme je faisais de l’athlétisme ou de la natation, cela représentait bien plus que ça. Le seul avec qui j’ai partagé cette passion est mon ami d’enfance. Inconsciemment nous reproduisions la relation Jacques/Enzo ! On se chronométrait dans la baignoire et on cherchait du fond du côté de l’Esterel/Mandelieu jusqu’à trouver 30 mètres. Mais on ne s’entrainait pas, on prenait une grande respiration et on allait le plus loin possible ! C’était enfantin et totalement inconscient…

(photo : archives personnelles de Gregory Forstner )

(photo : archives personnelles de Gregory Forstner )

Certains apnéistes abordent l’apnée sous un angle artistique. On pense notamment au travail de Julie Gautier et Guillaume Néry en vidéo mais aussi au travail certains photographes. En tant qu’artiste, que pensez-vous du lien entre l’apnée et les arts visuels (photo / vidéo) ?

La photo et la vidéo sous marine témoignent d’une sensation. Le photographe ou le vidéaste reconduit l’expérience en le mettant en scène pour le plus grand nombre. Les images de Guillaume Néry et Julie Gautier sont époustouflantes. L’ambition de l’art n’est pas de restaurer et de témoigner d’une sensation ou de la beauté d’une situation, mais d’ouvrir un champ esthétique (et philosophique) de l’imaginaire, critique et/ou poétique sur le monde, et pouvant être simplement conceptuel c’est à dire sans nécessairement la formulation d’un quelconque objet visible. L’art est proche de la pensée comme œuvre à part entière, c’est la leçon de Léonard de Vinci qui dit, « l’art est chose mental ». Personnellement je fais essentiellement de la peinture, donc le spectateur a un objet devant lui mais un tableau ne rend pas compte d’une sensation ou d’une idée, il est la sensation, il est la pensée. Et bien plus encore. Il est en quelque sorte et dans le meilleur des cas un objet non identifié dont la seule caractéristique qui nous ait accessible est le terme « tableau ». Par contre je considère que certains apnéistes, ou surfers (de la même manière que certains danseurs sont des artistes pendant que d’autres illustrent un propos narratif ou un exploit technique), peuvent être considérés comme des « artistes » suivant l’approche qu’ils ont de leur discipline. Il s’agirait dans ce cas de l’acte lui-même de plonger ou de danser sur une vague. Certains surfer (dont l’origine a une part spirituelle) et apnéiste en ont conscience et leur objectif dépasse l’exploit lui-même. Jacques Mayol et Enzo Maiorca avaient je crois, c’est peut-être plus évident chez Mayol parce qu’on connaît ses écrits, tout à fait conscience de cette dimension. Ils ont ouvert quelque chose. L’ironie, c’est que Mayol était préoccupé par l’effet du Grand Bleu sur la manière d’aborder l’apnée de façon essentiellement compétitive…

André Laban, un ancien plongeur de la Calypso du commandant Cousteau, a peint des centaines de tableaux sous la mer. En tant qu’artiste peintre, est-ce que le monde du silence pourrait vous inspirer ?

Non, car ce serait de l’illustration. Lorsque je nage je ne pense jamais à l’art – je ne pense à rien – je suis la pensée en mouvement. Si je tente d’en faire la projection, je ne serai plus dans l’expérience d’être au monde (ce qui s’approche de l’art) mais bien dans l’illustration.

Le 27 novembre prochain sera diffusé à la télévision française le documentaire de J.Espla  « Génération Grand Bleu » et dans lequel vous faites une apparition. Que pensez-vous de cette génération de passionnés ?

Je trouve ça très émouvant… Et pour être tout à fait honnête, je n’en avais pas conscience. Depuis mon adolescence, pour les raisons évoquées plus haut, je n’ai jamais parlé de ma participation dans ce film, ainsi je n’avais jamais fréquenté jusqu’à septembre dernier autant de personnes passionnés comme moi par la mer et dont le film fut une révélation. J’ai hâte de voir le film de Jerome.

 

Pour finir, avez-vous des projets liés au monde l’apnée ?

En Décembre, je profite d’un voyage à Munich chez mon galeriste Michael Zink pour me rendre ensuite à Dahab ou je vais retrouver entre autres, Miguel Lozano, Pascal Berger et Dimitris Koumoulos. Il y a également la deuxième édition de The Authentic Big Blue à préparer…

 

Gregory Forstner par Patrick Camboulive

Gregory Forstner à Amorgos par Patrick Camboulive

Si le travail artistique de Gregory Forstner vous intéresse, notez qu’en décembre, il participe à une exposition de groupe « Friends and Family » à la galerie Eva Hober à Paris. En 2018, son travail sera représenté dans les foires Art Brussels et Art Rotterdam avec la galerie Zink (Allemagne).
La monographie de Gregory Forstner  (éditions DILECTA, 2017) ainsi que son ouvrage  « L’odeur de la viande » (éditions Esperluète, 2015) sont disponibles en librairie.

(photo : Zoe Fisher )

France Apnée, novembre 2018